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11 février 2006

Papa-isme et mama-isme congolais.

Symboles culturels et leurs contenus

Sur le papa-isme et le mama-isme congolais :

abrutissement de la rationnalité ?

Au plus tard après le départ du dictateur Mobutu Sese Seko qui avait officialisé cette

pratique dans sa stratégie de renvoyer les masses congolaises dans la nuit irrationnelle des temps, le peuple congolais qui avait toujours pratiqué cette dénomination respectueuse pour les personnes âgées ( surtout de la part des enfants), mais aussi à titre d´éloge et de fierté même à l´égard d´enfants pour les encourager et les récompenser verbalement. « Tatu », « tata », et l´équivalent : « mamu », « mama » étaient donc non seulement des appellations familiales, mais aussi des dénominations face à des personnes âgées inconnues, ou face à des enfants élevés à ce titre adulte pour les louer de leur agilité, de leur sens de responsabilité sociale, de les remercier de leur amour et de leur affection.

Mais voilà, depuis le départ ou l´éviction de ce dictateur illuminé, le peuple, par habitude ou par simple passivité, continue à pratiquer cet usage qui transforme les rapports sociaux en une jungle affective et sensitive, en repoussant la norme coutumière sélective pour l´attribuer à tout le monde à tord et à travers. Curieusement, cette société reprenait ses prénoms chrétiens, ce qui est, à mon avis une erreur identitaire fondamentale, mais gardait ce papa-isme et ce mama-isme déroutant. Cette attitude qui consiste à négliger le principal (entendez ici l´identité authentique africaine), pour conserver un cachet chrétien qui mène directement à l´aliénation et rappelle ou rattache à un colonialisme borné et conformant.

Et au lieu de revenir au contenu et à la valeur traditionnelle qui elle sous entendait le pater familias, le bon père de famille qui protégeait la mère, et défendait ses enfants (Entendez ici protéger la nation et défendre le peuple), la jungle sociale congolaise attribuait à tous et à toutes ces appellations respectueuses. Ainsi les voyous, les brigands, les escrocs, les filles de joie se voyaient accéder à une noblesse qui rendait toute distinction sociale caduque, et confinait les bons, les louables avec les véreux, les fourbes et les malfaiteurs. La nuit, tous les oiseaux sont gris, dit-on ; et cependant, la société ne vit pas dans la nuit éternelle. Ces usages, pour traditionnels qu´ils soient, sont des acquis de longue pratique, de longue expérience qui témoigne de la sagesse d´un peuple, de sa volonté à protéger le bien, les valeurs respectables de la société telle que la responsabilité, le respect dû aux personnes âgée, l´amour, l´affection révélée par des enfants particulièrement louables. Si donc on emploie ces valeurs à tord et à travers, on détruit quelque chose d´important et de fondamental dans la rationalité concourante de l´échelle des valeurs de la société. Est-ce vraiment souhaitable ?

Au Congo, au pays du bâton d´Ishango, on se croirait à la foire des symboles irrationnels et des usages culturels corrodés par la sensiblerie : le gouffre amers et sans fin de pauvreté mentale et de l´aliénation.

Qu´on attribue à Simoni Kimbangu cette appellation, passe encore ; après tout, il l´a largement mérité, pour tous les temps. Mais qu´on l´accorde à n´importe quel écornifleur, à tout incapable, à tout vagabond ; cela me choque énormément. En ce qui me concerne, mon père et ma mère sont morts ; il n´y a pas lieu à ce que j´appelle un étranger du nom de papa ou de mama. Pour ce qui est du grand prophète Simoni Kimbangu, l´appellation prophète suffit amplement. Encore que ce soit le seul à qui j´accorde le droit de porter, en dehors de mes parents, le nom de papa. Pour moi, il reste que ces dénominations de mama et de papa ne sont réservées qu´à ceux qui y ont droit, pas n´importe quel énergumène inconnu, et peut-être de douteuse vertu.

Curieusement, personne n´ose donner cette appellation à Patrice Lumumba, et pourtant il a donné son sang pour la liberté de ce pays dont il a défendu le plus bel idéal jusqu´à la mort. Tout le monde le sait, il n´en voudrai pas : trop douteux, trop nuageux. Et sans doute aussi trop commun.

Pour un peuple largement intelligent et rationnel, après tout le bâton d´Ishango le prouve : il y a 22.000 ans, ce peuple découvrit et pratiqua les mathématiques, l´abstraction de quantification et de spéculation numéraire. Et c´est d´autant surprenant que ses valeurs rationnelles soient élaguées volontairement par des choix sociohistoriques ou culturels le vidant de sa richesse et de son legs rationnel.

Le talent rationnel dans une société est tellement rare ; on l´estime, dans les meilleurs conditions de connaissance, de culture et d´instruction, à un sur un millions d´habitants ; c´est dire que pour obtenir ces génies, il faut bien plus d´effort que leur priver gratuitement de moyens d´épanouissement. Non, il ne faut pas confondre instruction avec génie d´abstraction ; apprendre par cœur et répéter ou pratiquer comme un perroquet, c´est bien autre chose que faire preuve de créativité et découvrir des liens logiques et rationnels étant directement liés à l´enrichissement scientifique. 

Certes, dans toute l´Afrique, et ce depuis le 7ième siècle pour les hordes islamiques, et depuis le 14-15ième siècle pour les hordes chrétiennes, les cultures africaines ont été détruites et mises à mal dans leur paisible évolution. Et aujourd´hui encore, bien plus subtilement, elles crachent misère et désolation sous le poids écrasant de l´impérialisme racial et partial occidental qui exerce sur eux des pressions politiques, économiques honteuses : leur monnaies sont confisquées à 65% oit disant pour les assurer, pendant qu´ils devaient se complaire avec le reste en argent de poche. Si le fond Monétaire International et la Banque Mondiale ne mettaient pas la main dessus.

Raison de plus pour mieux objectiver la société vers ses devoirs envers elle-même, envers la science et la rationalité théorique et pratique motivées par la défense et la promotion de ses intérêts présentement en danger.

Vouloir sortir du marasme du sous développement en s´abrutissant encore plus, en se privant de moyens rationnels et dialectiques abstractionnels propices à élever l´esprit créatif et discursif de la société, ce n´est pas avoir respect de soi-même, ni de son propre avenir, ni des siens. Et ceux qui entretiennent cet état des choses sont irresponsables et criminels, parce qu´ils mettent l´avenir de bien de générations innocentes en danger.

Musengeshi Katata

Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu.   

munkodinkonko@aol.com     

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