Les noirs ont-ils déjà perdu les présidentielles 2007 ?
Pouvaient-ils, avaient-ils la chance de les gagner ?
Français noirs, noirs français ou français tout court ?
"La véritable grandeur le l´homme ne se mesure pas à des moments où il est à son aise, mais lorsqu´il traverse une période de contradictions et de défis."
Martin Luther King. Extrait de « La force d´aimer »
Commentaire sur afrikara de l´article : les noirs de France ont-ils déjà perdu la présidentielle de 2007.
J´ai longuement réfléchi avant de me décider à commenter cet article. Ce qui m´a fait autant hésiter, ce sont les questions pertinentes qui entouraient le titre, mais aussi le contenu, sans oublier les autres commentaires qui ont été faits sur cet article. Un malaise m´avait, de prime abord envahi, parce que je me suis demandé si le rédacteur de cet article lançait un ballon d´opinion pour sonder le réalisme des noirs habitués lecteurs d´afrikara, ou s´agissait-il tout simplement d´un exercice d´opinion comme il y en a dans chaque page Internet et permettant tout simplement aux lecteurs de donner leurs opinions sur un sujet prochain d´actualité lié à l´avenir des noirs français et de la démocratie française tout court.
J´opte pour ce dernier point de vue, mais comme le titre le suggère, je me demande si réalistement les noirs ont une chance quelconque d´emporter les présidentielles de 2007 en France. Ma réponse toute humble et pratique : quiconque ne participe pas, a déjà perdu. Il faut donc être de la partie, être candidat du jeu ou de l´enjeu démocratique pour prétendre à quelque ambition que ce soit. Maintenant, participer, ce n´est pas gagner ; un candidat noir a-t-il une chance objective de l´emporter ? Si on part de certains chiffres, notamment que près de 40% de français sont racistes, et que les noirs français ne représentent que 10% de la population française, parler de victoire, c´est être très optimiste. Plutôt exagérément optimiste que réaliste. On entend parler de Pocrain, de Dieudonné, de Taubira : ce sont des têtes de file noirs porteurs d´espoir. Et au-delà du fait qu´ils soient noirs, je doute fort qu ils se considèrent comme noirs en briguant la présidence de France. On doit les considérer comme des candidats tout court. Et cependant, malgré tout, on ne peut passer devant la question : l´un d´eux a-t-il la chance d´être élu ? En toute franchise, je l´espère vivement, pour la démocratie française et ses prétentions antiraciales ; et cependant j´ai bien peur qu´on ne puisse pas tromper ni les statistiques, ni la structure réelle de la société française. On a beau discuter, afficher de bonnes intentions, jurer toutes les bonnes fois du monde, lorsqu´il s´agit d´élire un président français, celui qui entre autre est celui qui dicte la politique étrangère et depuis 46 ans gère et gouverne la francafrique, les français cessent de blaguer. Et des réflexes conservateurs irrésistibles entrent en jeu. Et je crains que tout espoir d´un noir à habiller la haute magistrature de l´Etat français ne soit qu´hypothétique. Et cependant, d´avoir participé au jeu des enjeux démocratiques affermit et assurera aux noirs français, s´ils savent s´organiser et faire valoir les idéaux de France, comme on les attend d´eux, et qu´ils peuvent non seulement s´en réclamer mais aussi les défendre et les perpétuer dans l´espace et le temps, ce sera un gain fructueux pour le pays de France, pour le respect de l´unité et de la cohésion de son peuple.
Autre chose cependant restera un point noir : l´avenir de l´infamante et honteuse francafrique. Avec ou sans président noir, elle doit disparaître pour ouvrir l´avenir à une meilleure humanité d´intentions envers l´Afrique. Sarkozy, qui semble le meilleur porteur d´espoir réaliste aux présidentielles de 2007 s´est jusqu´à ce jour défendu de savoir ce que fait ou ce qu´est la francafrique. C´est l´art politique que d´ignorer ce dont on n´est pas encore confronté. De deux choses l´une s´il est innocent : alors Ils serait le plus piètre politicien que la France aie jamais connu, ou ce ne serait rien d´autre qu´un menteur invétéré comme tous ses prédécesseurs, ce qui n´augurait rien de bon. Et cependant, je dois me répéter sur ce point : la fierté et le respect que gagneront les noirs de France, et même du monde entier, seront d´autant grands, sinon seront-ils moins discriminés, si la France acceptait de traiter l´Afrique en partenaire loyal dont on respectait les intérêts plutôt que de les déconsidérer ou de les fouler sournoisement sous ses pieds. Et la relance économique en Afrique pourrait apporter à l´Europe, et à tous les africains de la diaspora et du monde un regain nouveau de foi en un système économique, financier et socioculturel pour lequel ils avaient toujours œuvré sans en récolter ni reconnaissance, ni véritable justice. Et ce nouveau deal, ce partenariat nouveau respectueux et équidistants de vues et d´intérêts rendrait au monde noir sa place au sein d´une communauté qui ne jouait plus au racisme, à la discrimination et au privilège unilatéral organisé de la race blanche. Nous serions engagés dans une nouvelle ère qui réparerait paisiblement et solidairement ce qui, des siècles durant avait été sauvagement détruit : la confiance en un monde qui appartienne à tous. Sans distinction de race, de nationalité, de lieu de naissance, de religion, ou de fortune. Et c´est à ce rendez-vous auquel je convie la France à se rallier, en prouvant que ce pays, quel que soit son passé, ses erreurs, ses hésitations, ses tourments, était bien le pays d´origine des droits de l´homme et qu´il avait l´intention de le rester. Pour le bien de tous. En toute liberté.
Musengeshi Katata
Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu
munkodinkonko@aol.com