Aux amateurs de l´afrocentricité, de la renaissance africaine et autres…
Renaissance et Afrocentricité pour quoi faire, que diable ?
A la fin, je me demande comment la rationalité africaine fonctionne. Nos femmes et nos enfants meurent de faim et d´apathie face à un appauvrissement qui devenait chaque jour cruel et insultant, et en lieu de chercher les solutions aux problèmes réels et quotidiens qui perdurent dans nos contrées depuis plus de 600 ans, quelques intellectuels ne trouvent mieux que de nous nourrir de vagues théories de rassemblement. Renaissance africaine, afrocentricité ! Belles paroles que tout cela, mais quand les africains se rendront-ils compte que toute théorie quelle qu´elle soit, se doit de répondre ou d´apporter des solutions directes et palpables aux questions immédiates des temps ?
Parce que sinon : afrocentricité et renaissance ; tout cela n´est que verbiage d´intellectuel en mal de réalisme. Car ne pas voir ce qu´il faut changer rapidement en Afrique, en Haïti, en Guadeloupe, aux Etats-Unis pour rapprocher la race noire de ses sources sociohistoriques culturelles…si tel est que ces africains ont encore quelque chose de commun à défendre ou à entretenir, c´est faire de la démagogie de la pire espèce : de celle qui apporte un nouveau problème, un nouveau champs de bataille ou de discussion alors que le principal, la solution à l´indépendance économique, politique et culturelle n´a été ni entreprise, ni même sérieusement discutée ! Or, il s´agit dans l´existence, de se réaliser librement et souverainement. Et sur ce point de vue, pas un mots de ces nouveaux gourous du rassemblement africain. On prétendait cependant que cet aveugle rassemblement allait résoudre tous les problèmes ! Tiens, moi je serai satisfait si on répondait à ma question : depuis quand la liberté africaine serait abandonnée à tiers ; depuis quand la liberté de quelqu´un, d´un peuple se ferait-elle par l´étranger ? Qu´y avait-il de commun entre un sénégalais et un burundais, par exemple ? La couleur de peau ? N´allait-on rapidement là à organiser un racisme noir ?
Tout ce beau prétexte, à mon avis, ne servirait qu´à se guérir d´un immense complexe d´infériorité en se cachant sous la masse. Ou alors ce serait, face à la relative cohésion culturelle et économique occidentale, un réflexe analogique faisant appel à une association ou un rassemblement d´opprimés incapables de se libérer de leurs chaînes, de ceux qui, à défaut de briller par l´innovation et la créativité, cherchaient à se réchauffer ou à se tranquilliser la conscience sous une nouvelle appellation contrôlée ? Le droit de dormir tranquillement en se disant : pendant que moi je disserterai sur ma petite renaissance ou mon afrocentricité, l´homme blanc, lui me construirait et me fabriquerait les moyens techniques et scientifiques avec lesquels je vais me réaliser ? Si ce n´est pas l´erreur que firent nos arrières parents en croyant que l´occident leur ferait un jour un joyeux transfert de technologie. Cette faiblesse intellectuelle, hein ! Où en sommes-nous aujourd´hui ? Pénible, ce genre d´erreur. Plutôt dangereux.
Personne n´avait vu que ce qui avait fait au passé la faiblesse des africains étaient leur manque de défense militaires et économiques appropriées face à leurs ennemis ? Fallait-il un instant croire qu´avec une pathétique théorie de rassemblement qui n´avait pas pris la peine de donner, même théoriquement, des solutions aux maux journaliers des africains ; qu´ainsi, on apaiserait ces malheureux en les convoyant vers une quelconque aveugle religion de l´union ? Mais mes amis, à votre avis à quoi sert donc la théorie, sinon à résoudre des problèmes immédiats et importants ?
A mon avis passer à côté de la pauvreté et des misères de l´Afrique, du monde noir en général pour venir concocter des théories de l´abondance à la grande table des illuminés et des attardés…j´ai hélas bien le sentiment que l´intellectuel africain qui se lançait dans cette gratuite occupation, ne souffre justement d´une maladie que nous ne connaissons que trop bien : le manque de réalisme conséquent et pratique. Et cette fièvre nous est bien connue, parce qu´elle a notamment été la cause de tous les déboires passés de l´Afrique qui, au lieu de résoudre ses contradictions et se donner les moyens imaginaires et réels de progresser et de s´épanouir, s´est complu dans des palabres et une expectative infructueuse et, comme on le verra aujourd´hui, sans issue. Ce qui l´a enfermé dans une faiblesse chronique, présentant par-là à ses ennemis une victime facile. Ne s´agit-il pas, dans une théorie de rassemblement ou même d´intérêt, de résoudre des problèmes et faciliter le traitement de communs projets ? Mais avec quels moyens, que diable, si on restait pauvre et soumis à la sangsue économique occidentale ?
Alors je me demande : se rassembler pour sortir du piège de la misère et de la pauvreté, ou se rassembler pour lutter contre quelque chose, contre un monstre contre lequel on n´avait pas le courage de faire face intellectuellement et pratiquement ? Ou serait-il une façon comme une autre de vouloir entretenir un communisme tropical bon enfant encore plus illusoire que celui qui s´écroula dans l´Est européen ? Parce que si réellement on voulait sortir du piège actuel de la misère et celui de la mendicité ; il n´y a qu´une voie : celle qui produit les moyens et les instruments permettant d´atteindre ce but. Et naturellement se libérer de la francafrique et veiller à ce que les accumulations économiques, sociales africaines ne soient ni dilapidées à ses dépends, ni ouvertement escroquées par l´étranger.
Mais pour cela faut-il créer une nouvelle association de croyants délirants ? Je ne le pense pas. Par ailleurs, toutes ces théories qui passaient ouvertement devant les différences et les droits individuels de la diversité culturelle de la race noire, celles-ci me donnent toutes l´impression d´une énorme prison mentale collective dans laquelle on veut sournoisement noyer la vérité ou la cacher, en place et lieu de résoudre les problèmes économiques urgents et parvenir à libérer les africains de leurs complexes et de leurs manquements. Et chez moi, lentement, une colère me montait à la gorge, parce que j´avais la nette impression qu´encore une fois, quelques illuminés voulaient prendre les africains intelligents pour des bourriques. Car les problèmes avec lesquels nous sommes confrontés sont tellement complexes et graves qu´ils nécessitent rapidement des réponses précises et rapides. Ainsi par ailleurs qu´une stratégie sévère à suivre pour changer définitivement les choses. Pas une grotte préhistorique qui offrirait, certes une sécurité momentanée face aux intempéries naturelles, cependant que les vrais problèmes de l´émancipation rationnelle face à des traditions archaiques ou primitives, de l´instruction et ses valeurs critiques et objectives, ceux de l´alimentation, de la formation professionnelle et de la médecine adéquate eux, se devaient d´être résolus par de moyens et des instruments économiques et financiers conçus et produits dans un détail singulier, réaliste et exigeant.
Et à mon sens, ce communautarisme jacobin et faussement tranquillisant était plus trompeur et abrutissant qu´il n´était à la hauteur des nécessités culturelles africaines contemporaines. Notons que la meilleure des unions, dans toute l´histoire humaine, ne se fait pas par théorie ou par dictat ; mais bien instinctivement par rapprochement d´intérêts conjoints. Maintenant, il est possible que cet afrocentrisme serve plus à guérir la solitude culturelle de quelques intellectuels afrodescendants américains, haïtiens, jamaïcaine ou autre à bout de latin; mais s´ils ne savaient pas produire des solutions intelligentes à leurs problèmes, pourquoi ne se taisaient-ils pas, que diable ! Le problème de leur dépendance actuelle à l´économisme ou à la domination culturelle de leurs maîtres esclavagistes d´hier ; ce problème n´est pas pour autant résolu en ce qu´on se rapproche mentalement ou affectivement de l´Afrique. Il faut hélas lutter contre ce monstre négativiste en lui faisant accepter nos droits à la liberté et à la libre réalisation sensible. Sans cela, ce rassemblement communautariste de la race noire ne serait rien d´autre qu´une association d´incapables, de complexés aliénés à leurs chaînes, ou d´anciens esclaves cherchant asile dans une nouvelle illusion d´où ils ne sortiraient que bien plus aliénés qu´auparavant. Celui qui se sent lié à l´Afrique, celui-là sait où elle se trouve ; et s´il veut œuvrer à sa prospérité, nul ne l´y empêchera. Mais croire que pour boire un litre de lait on doit acheter toute une vache, c´est de la pure foutaise.
Ceci dit, et en conclusion, la race noire se doit, si elle a compris et bien assimilé les leçons de l´histoire qui est la sienne, de se libérer de ses propres contradictions et malfaçons intellectuelles, mentales, rationnelles. Et se défaire du joug occidental aliénant qui réduit sa liberté à une succursale hier méprisée, aujourd´hui autorisée parce qu´aliénée à la race blanche. Tout cela a une incidence et une portée économique, financière, culturelle sur son avenir. Jouer à se trouver des associations sans buts lucratifs qui nous cacheraient de nos devoirs pressants actuels, c´est hélas faire la preuve qu´on n´a rien compris, qu´on ne sait pas où se trouve le principal et les importants facteurs dont toute culture aimée et défendue se nourrit. Car si les noirs – et apparemment cela semble le cas – se refusent à briser leurs chaînes et à lutter pour le bien être de leurs femmes et de leurs enfants, quitte à se rassembler ou à croire à une commune renommée ; toutes ces théories vides et affamantes ne lui rendent ni sa liberté, ni son pouvoir social déjoué, encore moins son espoir d´avenir ou guérissent ses blessures passées. Parce que la liberté, il faut la faire et la défendre individuellement, collectivement ; aucun rassemblement de belles théories vides et passives n´a rendu à ce jour un seul être humain heureux et libre. Seuls la production conséquente et appropriée de moyens de réalisation, ainsi qu´une lutte avertie et vigilante pour sa liberté et son indépendance sont génératrices de véritable liberté.
Musengeshi Katata
"Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu"
Forum Réalisance