Sur la valeur réelle et l´efficacité de l´aide. Article paru dans le Figaro.
Propos recueillis par Laure Mandeville, à New York
Bill Clinton : «Les Américains ont beaucoup appris depuis le 11 Septembre».
«Qui peut empêcher
l’immigration, quand il y a la famine ?», demande Philippe Douste-Blazy.
«Il faut collecter comme pour une campagne électorale : lorsque les gens
croient à une cause, ils donnent», lui répond Bill Clinton.
Le Figaro Magazine – Vous faites cause
commune sur plusieurs projets de lutte contre la pauvreté et les maladies dans
le tiers-monde. La tempête économique ne risque-t-elle pas de balayer tous ces
projets de développement ?
Bill Clinton – La crise rend plus
urgente que jamais l’aide au développement des pays riches vers les pays
pauvres. Deux milliards de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour, un
milliard avec moins d’1dollar. Ce n’est pas tenable. Si le système financier
américain s’est effondré en raison d’un excès d’investissement dans les
subprimes, on constate que les économies européennes ont, elles aussi,
massivement investi dans ces valeurs immobilières qui ont enrichi une minorité.
D’où la réaction en chaîne : les fonds d’investissements britanniques, à cause
de la crise irlandaise ; l’Islande, qui provoque à son tour du chômage en
Angleterre ; et c’est ainsi que la pauvreté, inégalité sans cesse croissante,
finit par se refléter dans tous les pays. L’interdépendance financière étant
globale – pour le meilleur et pour le pire –, il est urgent de comprendre où se
situent les exigences de la stabilité économique, et de faire la différence
entre investissements excessifs et spéculatifs et investissements sûrs, dans
des industries manufacturières ou des services. L’aide au développement doit
s’inscrire dans ce mouvement, afin de créer des opportunités pour tous, et
mettre un terme à l’inégalité entre pays pauvres et riches, qui déstabilise nos
sociétés. Une profonde prise de conscience s’est opérée aux Etats- Unis, du
fait que nous nous sommes laissés aller à vivre de manière trop séparée du
reste du monde. Il faut agir sur ce front-là, non pour acheter les bonnes
grâces de tel ou tel peuple, mais parce qu’il y va de notre responsabilité,
comme de notre intérêt.
Philippe Douste-Blazy – La crise
aura de terribles conséquences pour nos pays, c’est sûr, mais plus encore pour
les plus pauvres, notamment l’Afrique subsaharienne, où le niveau de vie
s’effondre, où les épidémies se multiplient. Un enfant meurt toutes les trente
secondes de paludisme en Afrique, alors que les médicaments existent en
Occident. La santé publique devient un problème économique, dès lors que la
jeunesse n’est pas soignée et qu’elle n’a pas le ressort pour assurer son
développement. Or l’aide publique au développement ne va pas augmenter. Nous
espérons qu’elle ne baissera pas : ce serait une catastrophe. La solidarité
dans la mondialisation n’est pas seulement une question éthique, mais
politique. A quoi servira une politique d’immigration européenne si elle ne
s’accompagne pas d’une politique de développement minimale ? Quel homme politique
peut faire croire qu’il va empêcher l’immigration avec une loi si derrière les
frontières il y a la famine ? Nous vivons les deux premiers millimètres d’une
vague de 30mètres... Si nous ne réglons pas ces problèmes, le XXIe siècle sera
d’une immense violence.
Le Figaro Magazine – Pensez-vous
que, malgré la crise, l’Administration Obama sera plus altruiste et qu’elle
changera la donne pour l’aide au développement ?
Bill Clinton – Durant leur campagne,
Obama et Hillary ont tous deux affirmé qu’il fallait augmenter l’aide au
développement. On parle beaucoup de l’éventuelle création d’un Fonds mondial de
l’éducation sur le modèle du Fonds global contre le sida. Avec 10 milliards de
dollars, on pourrait mettre à l’école tous les enfants non scolarisés dans le
monde... Robert Gates, qui fait un travail remarquable – il a été maintenu à
son poste par Barack Obama –, est le seul secrétaire à la Défense de l’époque
contemporaine à avoir dit qu’il fallait augmenter le budget du département
d’Etat, même si le budget militaire devait être réduit, car il serait fou de
penser qu’on peut résoudre les problèmes du monde seulement par la force ! Les
Américains ont beaucoup appris depuis le 11 Septembre. Plus personne ne fait
confiance à l’équilibre artificiel issu de la guerre froide. Un accord
implicite avait été conclu entre l’Amérique et ses alliés. Celle-ci maintenait
un parapluie de sécurité en donnant la part du lion aux dépenses militaires,
tandis que les autres pays consacraient une partie plus importante de leur PIB
à l’aide au développement. Ce n’est plus tenable. Sans doute, à cause de la
crise, l’aide au développement n’augmentera- t-elle pas autant que le président
Obama et Hillary l’auraient souhaité, mais je serais surpris qu’elle diminue.
L’Amérique va s’efforcer de trouver de l’argent, notamment sur le modèle des
récoltes de fonds pour les campagnes électorales. La méthode a montré que
lorsque les gens croient à une cause, ils donnent.
Le Figaro Magazine – Pour pallier
les insuffisances de l’aide étatique, vous préconisez l’un comme l’autre le
recours à des financements innovants. L’organisation Unitaid s’est d’ores et
déjà engagée dans ce sens...
Philippe Douste-Blazy –Quelque 50
milliards d’aide gouvernementale manquent chaque année à l’appel, malgré
l’engagement des Etats membres de l’ONU, pris en 2000, de fournir 150 milliards
de dollars par an sur dix ans. L’élément additionnel majeur qui émergera au
cours des prochains mois sera donc le phénomène des financements innovants,
microcontributions volontaires qui permettront d’instaurer une mondialisation
plus solidaire. Unitaid – organisation abritée par l’ONU créée par cinq pays
fondateurs, dont la France, et financée par le prélèvement de 2 euros sur les
billets d’avion des passagers des pays adhérents – a montré l’exemple en créant
un financement indolore et pérenne. C’est un succès. A travers Unitaid, la
Fondation Clinton a pu traiter trois enfants sur quatre atteints du sida dans
le monde. Ce n’est pas rien ! Nous pensons étendre ce modèle en créant ce que
nous appelons une contribution volontaire citoyenne planétaire. Sur les 2,5
milliards de voyageurs dans le monde, 1,5 milliard réservent leur billet sur
internet par le biais de trois grosses sociétés. J’ai demandé à leurs
présidents d’accepter qu’apparaisse sur leur site une fenêtre proposant de
cotiser 2 euros supplémentaires sur le coût d’un billet d’avion pour financer
l’aide au développement. Ils ont accepté. Nous espérons lancer ce projet à
l’ONU en septembre.
Bill Clinton –Unitaid est le modèle
du futur. C’est la seule grosse organisation qui s’appuie sur les contributions
modestes d’un grand nombre de gens. On peut faire une analogie avec notre
récente campagne présidentielle, qui a permis des levées d’argent massives à
travers internet. Des millions de gens ont donné de petites sommes qui ont fait
boule de neige, générant des financements sans précédent pour
Obama et Hillary.
Le Figaro Magazine – Compte tenu de
possibles conflits d’intérêts induits par le nouveau poste de votre femme, Hillary,
vous aurez de larges contraintes pour accepter les dons de la part des Etats.
Comment votre fondation va-t-elle survivre ?
Bill Clinton –Mon accord avec
l’Administration Obama dit explicitement que les gouvernements qui soutiennent
mes projets de développement, de santé ou énergétiques, comme l’Australie ou
l’Irlande, peuvent continuer à me financer s’ils le veulent. Si un nouveau
gouvernement se présente, je devrai régler cette question avec le département
d’Etat. Cela ne m’inquiète pas. Mon problème, c’est l’économie. J’ai perdu une
grande quantité de dons privés et j’ai dû dépenser la moitié de mon épargne
pour garder mes cliniques ouvertes. Nous sommes donc en train de revoir la
liste de nos contributeurs, pour l’élargir : essayer de rassembler énormément
de petites contributions, plutôt que de miser sur les dons massifs de
quelques-uns.
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* Bill Clinton, 42e président des Etats-Unis, dirige la Clinton Foundation et
la Clinton Global Initiative, ONG vouée à combattre la pauvreté et la maladie
en Afrique. En dix ans, la Fondation Clinton a levé plus de 500 millions de
dollars grâce à des donations.
* Philippe Douste-Blazy, secrétaire général adjoint des Nations unies, est
conseiller spécial du secrétaire général, chargé des financements innovants. Président
d’Unitaid – aide médicale dépendant de l’ONU –, il oeuvre en partenariat avec
la Fondation Clinton.
Forum Réalisance Sélection
Mais revenons à l´interview. L´Amérique aurait appris bien de choses du 9/11 en 2001 ? En quoi s.v.p ? En envahissant illégalement l´Irak en 2003 ou en bombardant rageusement l´Afghanistan ?
Pour l´Afghanistan, le premier ministre canadien disait, la semaine passée après la visite d´Obama que cette guerre était "futile"! Elle ne répondait, malgré le droit de suite légitime des américains, ni aux enseignements du christianisme, ni à une précise punition des responsables. Bombarder ainsi un pays en long et en large sans savoir où et qui sont les véritables criminels du 9/11...c´est assouvir la rage plutôt que faire justice. Le grand problème de l´occident face à l´Islam fondamentaliste est l´absolutisme criminel que cette religion intolérante prêche. Et l´existence de l´oppression de la femme, des signes et usages islamiques (charia, domination de la femme, absolutisme coranique face à l´instruction rationnelle et le développement laiique de la société et de la doctrine du pouvoir), tout cela n´alimente que bien régulièrement les noyaux fondamentalistes frustrés du monde entier par leur ignorance autant que leur incapacité à s´industrialiser et donner une meilleure vie à leurs enfants. Ces frustrés cherchent donc en revanche un adversaire réputé et riche, un ennemi sur lequel ils peuvent larguer leur frustration. Et plus cet ennemi est grand, et plus ils croient être aussi grands. S´ils avaient la meilleure religion, pourquoi diable ne se mettent-ils pas sans retard à aller au paradis; celui-ci ne serait-il accessible que lorsqu´on a versé le sang d´innocents étrangers ? celui qui croit à cette aberration n´est pas seulement idiots, il est primitif et borné. On ne peut être plus...désespéré de la raison.
On est tout de même surpris lorsque Bill Clinton prétend que l´Amérique a appris...de quoi, en créant Guantanamo et en brusquant autant les valeurs démocratiques que les alliés européens ? Cette crise financière, n´a-t-elle pas été déclanchée en 2001 pour noyer, avec des titrisations criminelles et largement irresponsable, les fianances mondiales pour se donner les moyens non seulement de financer les guerres de George Bush, mais aussi de "s´acheter le monde à bas prix" avec de la fausse monnaie ? Et maintenant, si quelqu´un disait, au vu des conséquences désatreuses et cruelles pour l´économie américaine et celle du monde, que l´Amérique avait appris quelque chose du 9/11...ne serait-on pas aveugle et plutôt simple d´esprit ? produire aveuglement, se refuser catégoriquement à toute politique mondiale écologique concertée; oui, qu´a-t-on donc dable appris sinon à imposer au monde entier sa puissance et son arrogance démonstrative ? Par contre, si on me disait que depuis l´élection d´Obama l´Amérique avait fait preuve de sa capacité de jugement, je serais tout à fait d´accord. Mais de 2001 à la fin 2008, cette Amérique n´a rien fait d´autre que se rouler dans la boue. Il ne faut pas essayer de tromper son monde.
Généralement, et cette tendance semble la logique la plus illogique du rationnalisme occidental, c´est que lorsque cette culture est acculée ou dans l´embarras, elle cherche á trouver la faute ailleurs ou à résoudre ses contradictions en en faisant porter les responsabilités aux autres cultures étrangères. L´aide dans laquelle Bill Cinton semble devenu un gourou n´est rien d´autre que la plus grande fausseté qui existe au monde, parce qu´elle empêche, dans sa logique de castration à long terme, aux aidés á développer un existentialisme de prise en charge par soi-même. Aider, c´est bien, mais on doit surtout veiller à ce que l´aidé se mette le plus rapidement que possible à assoivir par lui-même de son avenir et de ses besoins. L´aide ne doit ni abrutir, ni éterniser la dépendance de l´aidé au phénomène de l´aide. Aider aujourd´hui les enfant à aller à l´école n´a pas pour but d´augmenter le nombre prochain d´immigrants en Europe, mais bien celui de gens qualifiés devant relever par leur créativité et leurs prestations, le manque dans la société aidée ! Sinon tout ce qu´on fait n´est rien d´autre que d´entretenir une chaîne vicieuse d´incapables faisant des enfants sans se donner la peine de leur donner, comme leur devoir de parent le leur impose naturellement, un avenir valable à leurs enfants qui, disons-le sincérement, vont veiller sur leurs parents quand ceux-ci seront vieux et faibles ! Mais si les jeunes et les vieux sont inscrits à l´indigence de l´aide...à quoi cela rime-t-il que diable ?
On l´a compris. Bill Clinton, tout avocat, tout démocrate qu´il soit ou président américain qu´il a été, n´est que le représentant d´une idéologie politique aussi bancale que primitive. Cela ne nous étonne pas: malgré que la crise que nous sonnaissons aujourd´hui ait commencé bien avant son entrée en fonction en tant que président, Bill Clinton n´a rien fait pour arrêter les hérésies qui empoignaient la société américaine dangereusement: notamment vivre du crédit bon marché, être dépensier de l´énergie et des matières premières et croire que l´Amérique n´était ni liée à l´efficience et à la rentabilité de la production. Il suffisait seulement de bombarder quelques pays contestataires ou mis idéologiquement à l´index pour que le bonheur américain soit parfait et éternel. Aujourd´hui l´Amérique se réveille avec une horrible crise qui va lui imposer, pour en sortir et garder son niveau de vie, de réparer toutes les erreurs et de se défaire de tous les abus que ce pays, dans son arrogance gratuite et aveugle, s´était permis d´entretenir. A la place de Bill Clinton, je serai plutôt modeste et retenu dans mes opinions, surtout si celles-ci sont loin d´être à la hauteur des exigences des temps qui ont, depuis cette crise, bien changé.
Tout ceci prouve combien Obama est brillant et averti: lui a vu venir le train fou qui entrait en ville, ainsi que l´impérative nécessité d´un changement de philosophie politique. Le communiquer aux autres est ardu, comme on le voit actuellement avec l´opposition républicaine idéologiquement embusquée, mais c´est seulement une question de temps avant que le monde entier ne se rende compte que pour aller de l´avant, il faut absolument se défaire de ses vieilles intentions dépravées. Même l´ONU doit le faire. Dans l´intérêt d´une véritable liberté et d´une véritable démocratie dans le monde.
Musengeshi Katata
"Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu"
Forum Réalisance