Sarkozy : de faux cris de partenariat ?
Quand les avocats gouvernent : en réponse à la vision politique de Nicolas Sarkozy sur l'Afrique noire.
A beau mentir qui vient de loin…
« Un prédateur qui affiche une peau conciliante de mouton ne doit pas oublier que ceux qui le rencontrent sont surpris par les dents étrangement aiguisées et rapaces de ses grincements…et son appétit plutôt vorace et cannibale des intérêts des autres. Chacun peut prétendre ou aller prêcher n´importe quoi en Afrique ; mais à bien y regarder, on se rend compte que le mal et les abus du passé ont bien marqué son homme. Changer ? Mais alors ne faudrait-il pas commencer par rendre justice aux siens, à sa propre banlieue à domicile…? Au lieu de se pencher à la fenêtre plus pour cacher son incapacité à accéder à une vraie et objective conception de la liberté ; une qui ne cache ni fourberie, ni abus de pouvoir, ni fallacieuse hégémonie sur un continent qu´on a toujours considéré à tort et injustement comme étant le poulailler de sa cour vassale. » Musengeshi Katata
L’irruption des avocats en politique n’est jamais fortuite. Car, lorsque dans une société les coteries, les « réseaux » et les clans deviennent la "donne" politique la plus ordinaire, où l’ « efficacité » et la longévité politiques sont la norme, où le droit s’écrase devant le pouvoir de l’argent, où vertu et politique sont antinomiques... il ne faut guère s’étonner que la politique elle-même se transforme en une vaste entreprise d’intérêts.
Max Weber comparait fort à propos les états-majors politiques à des sortes de conseils d’administration.
Or, justement, dans cette situation, le métier d’avocat devient florissant car seul il a vocation à défendre les intérêts des états-majors.
Sur ce terrain dangereux où croque- en- jambes, tacles et placages sont les règles du jeu, les avocats sont les seules personnes techniquement outillées pour transformer le cas échéant la « mauvaise cause » d’un client en « bonne cause », et la « bonne cause » d’un adversaire en une « mauvaise cause » comme on a pu s’en rendre compte avec la célébration officielle du mariage entre l'argent et la politique après l'élection présidentielle française. Les Africains dûment informés ne seront pas dupes de la réception offerte par Bolloré au nouveau président français et du "contre-feu" du discours de Dakar.
L'ancien ministre de l’intérieur est décidément un adepte du manichéisme tout droit sorti de la pratique judiciaire ; il en est l’héritier, forcément. C’est la marque de sa profession. Mais une telle marque est politiquement désastreuse ; car un avocat ne peut vivre sans élaborer de typologie : le bon et le méchant, le client et l’adversaire, l’ami et l’ennemi, qui sont à son avis les métaphores vivantes d’êtres figés dans des postures irréconciliables.
Le pire, lorsqu’on est avocat, c’est de croire que les métaphores ne sont pas que des mots ; que les « bons » existent comme tels, et que les « mauvais » sont forcément mauvais : ce sont les « échoués » du système scolaire, les « bons à rien », les chômeurs et les resquilleurs du système économique ; bref tous ceux qui empêchent la société française de dormir sagement sur ses deux oreilles. Les africains en font partie, sans doute (à lire en filigrane dans le programme sarkozyen).
Que dire du langage de la technique de la plaidoirie sinon qu’il est lui aussi politiquement désastreux - avec une prédilection pour les formules hyperboliques, le grossissement, les arguments en dessous de la ceinture, l’appel permanent à l’émotion, le procès d’intention, la logomachie, l’agitation théâtrale... parce que les gestes parlent forcément quand les mots viennent à manquer.
Enfin, les avocats ont ceci de particulier qu’ils sont de piètres lecteurs qui privilégient la forme du texte sur le fond, les éléments sur l’ensemble, la procédure sur la vérité totale.
Cela même ne prédispose pas à une vision politique, à une vision large, à un regard qui embrasse l’horizon, qui peut voir au-delà de l’être lui-même.
Sarkozy veut se donner des airs de créateur d'utopie. Mais il brasse simplement du vent. Laissons donc la politique aux poètes, aux écrivains, aux philosophes, aux créateurs de civilisation qui s’adressent à l’âme des peuples ; qui conduisent les hommes au dépassement de soi, au voyage au-delà d’eux-mêmes, à la production de l’humanité grâce à laquelle les hommes prouvent qu’ils sont autres chose que des animaux.
Antoine Nguidjol
Paris
Forum Réalisance Sélection