Savoir s´accommoder à un monde changeant
Commentaire à l´article : FMI : Penser l’impensable ?
Une analyse d’Emmanuel Martin, Docteur-Chercheur en économie sur Afrik.com : http://www.afrik.com/article14271.html
Face à l´accélération de la démocratisation des moyens de production
En lisant cet article j´ai été surpris par la distance qui existait entre la réalité économique actuelle dont la pression se fait sentir d´année en année plus sensiblement (Et cela depuis les années ´80), et le formalisme retardé que représentaient les instruments classiques cités par l´auteur pour venir à bout de la crise financière internationale d´aujourd´hui. De deux choses l´une : ou l´auteur passe sciemment à côté de la réalité économique actuelle de notre monde poussé au changement, à la décentralisation par l´industrialisation chinoise et indienne, ou alors il ne s´agissait que de calmer les gens en leur mettant à vue que les instruments ou institutions appropriées s´attelaient activement à dominer la situation.
Et ce mouvement est puissant et irréversible par son ampleur car la Chine comme l´Inde auront derrière eux des marchés immenses et fructueux en synergie. En fait, tout le mal que c´était donné l´occident pour contrôler le monde dans son sens et ses intérêts est en train de s´effondrer. Parce qu´au lieu de démocratiser les moyens économiques et financiers de développement afin que l´Afrique notamment devienne un client fructueux de l´économie mondiale, on a veillé par cécité ou par abus d´hégémonie, à ce que ce continent reste pauvre et indigent.
Non, nous sommes bien conscients que dans les déboires actuels de l´Afrique certains pouvoirs africains attardés et plus corrompus que diligents ont leur part de responsabilité. Et cependant, la logique selon laquelle emploie ou on appauvrit les petites gens pour enrichir les riches et nantis ; cette logique ne valait plus rien ni au regard d´une véritable définition de liberté ou de démocratie humaine. Et avoir appauvri ses futurs clients, en période de quasi saturation économique et d´arrivée de nouveaux concurrents de bien commerciaux industriels ; cela va restreindre les gains des pays industriels lentement acculés. Rendre le prêt moins cher ne résout pas le problème si de nouveaux produits, de nouveaux investissements créateurs d´emplois et de gains nouveaux n´en étaient la conséquence.
Tout le monde parlait de restriction budgétaires des pays industrialisés auxquels on voulait, ô contradiction, inciter à faire de nouveaux déficits ? Or on oubliait le plus important : l´endettement effrayant de ces économies. Pour l´Allemagne, par exemple, cet endettement public était de 1.500 milliards € ! Pour la France 1.200 milliards €, pour les Etats-Unis 9.000 milliards $. Des bagatelles ? Pas du tout, parce que le paiement des intérêts de ces dettes endiguait les marges d´action et de pouvoir des gouvernements concernés. Et on se rendra vite compte, à l´avenir, que ces dettes vont influer grandement sur les formes démocratiques de ces sociétés. Continuer donc à en faire ou ne pas savoir s´en débarrasser, c´est aliéner le bien être et l´avenir de ses propres enfants, de ses pensionnés, et augmenter le nombre de pauvres dans sa société.
Je continue à affirmer, contre l´avis compatissant d´Emmanuel Martin auteur de l´article, que les hypothèques immobilières américaines étaient faisandées dès le départ (notamment parce qu´on ne prête pas sans garanties à des clients de faible crédibilité) et que les banquiers américains ont sciemment vendu ces produits douteux aux banquiers européens pour se débarrasser de pertes indésirables tout en ayant gagné sur les assurances et les tantièmes courants au placement de ces crédits. Et si cela n´est pas vrai, que coûte-t-il aux banquiers américains de racheter leurs produits pour montrer leur bonne foi ?
Je reviendrai toujours là-dessus : du rôle douteux que le FMI et la Banque ont joué et continuent à jouer le conditionnement des crédits qui ont été faits à l´Afrique tout en veillant à envahir les pays endettés avec des produits agricoles plusieurs fois subventionnés et vendus à des prix de dumping sur les marchés africains. Ceci a une conséquence foncièrement criminelle d´abattre dans l´arrière pays africain l´agriculture et l´élevage de ce continent. Le coup avait été fait en Haïti, en Jamaïque, au Ghana, au Burkina Faso, au Sénégal, au Mali…etc Et, pour moi, celui qui n´en parle pas ou oublie sciemment de relever cette perfidie organisée et soutenue par ceux qui prétendaient aider l´Afrique dans son développement…en l´appauvrissant, comme on le voit ; cet économiste qui ferme les yeux sur cette perversion voulue du commerce et de l´emprunt financier, celui-là n´est qu´un fonctionnaire de l´exploitation, plutôt qu´un économiste.
Le monde, qu´on le veuille ou non, qu´on l´accepte ou pas, est en train de changer. Et nous espérons vivement qu´il changera dans un sens plus démocratique que centraliste des moyens de réalisation. Et pour moi, penser l´impensable signifie que l´occident, ainsi que toutes les institutions qui ont toujours défendu aveuglement ses intérêts doivent se faire à l´idée que la liberté ou la démocratie dont tout l´occident se réclame tout en veillant cependant à ce que ces valeurs soient gérées et contrôlées par eux, que cette forme de philosophie économique et financière ne correspond nullement ni à la liberté, ni à une véritable démocratie. Parce que chaque pays, chaque peuple veut se réaliser avec ses moyens et dans ses rêves, pas être l´objet ou la chose du voisin ou vivre dans une dépendance et une pauvreté qui le privait d´avenir et de libre réalisation. Celui qui a compris cela et s´y conforme est arrivé au 21ième siècle, parce qu´il a compris ce que c´est que la liberté et la démocratie réelle.
Et qu´on ne se trompe pas en ce qui concerne l´Afrique, ce continent, malgré sa faiblesse ou même ses erreurs actuelles, aspire à la liberté avec une force, un désir particulier. Parce que l´histoire qui a été la sienne pendant de longs siècles ne lui a offert que larmes, mépris et violentements en tous genres de la part de ceux qui prétendaient être civilisés. Cette Afrique qui aujourd´hui se cherche et s´affirme chaque jour mieux qu´hier a fini par comprendre combien précieux sont les rêves et les attentes de ses propres enfants. Et que seuls ceux qui en ressentaient le profond tourment, ceux qui en percevaient les couleurs incessibles et riches, pouvaient les défendre et les protéger. Et la liberté, l´indépendance économique et politique sont de ces boucliers ouvrant sur une meilleure humanité.
Musengeshi Katata
Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu
Forum Réalisance