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12 juillet 2008

Afrique : Annuler la dette ?

Par Franklin Cudjoe, Accra, Ghana, le 10 juillet 2008

Une question de fond qui en cache tant d´autres


Durant les préparatifs de la réunion du G8 au Japon la semaine dernière les activistes de tous bords se démenaient pour s’assurer que leurs problèmes seraient au programme. Bien que le programme change chaque année, un élément demeure récurrent : l’annulation de la dette. Que ce problème fasse constamment surface pose la question de l’efficacité de ce que certains, bien intentionnés, considèrent comme un outil de développement.

Plutôt que de promouvoir l’annulation de la dette année après année, le temps est venu de chercher des solutions durables plus intelligentes. Les ministres des finances du G8 ont établi plusieurs objectifs impressionnants et louables pour favoriser le développement des pays africains et affirmer l’importance d’une « bonne gouvernance en matière de finances, y-compris une discipline fiscale durable dans les pays riches en ressources ». Si les pays africains doivent consolider leur croissance et tirer des millions de citoyens de la pauvreté, comme l’ont fait l’Inde et la Chine, une meilleure discipline fiscale et une meilleure gouvernance financière sont indispensables.

Depuis longtemps les africains ordinaires doivent lutter pour progresser, et ce, à cause d’une gouvernance désastreuse, de la corruption généralisée et du manque de liberté économique. En partant de bonnes intentions et en décidant d’annuler la dette, le G8 ne ferait qu’inciter à perpétuer ces politiques. Plus de 90 % de la dette extérieure des pays pauvres très endettés vient de prêts officiels de créanciers tels que le FMI ou la Banque mondiale. Une bonne partie de cette dette a été rééchelonnée et payée par les contribuables occidentaux. En dépit de milliards de dollars en dette annulée et en aide, les dirigeants de l’Afrique et leurs amis rockstars demandent encore plus d’aide pour pouvoir fournir les services les plus élémentaires. En 2005 le G8 se faisait le champion de l’annulation de la dette et promettait d’accroître l’aide extérieure de manière spectaculaire.

Cependant, il existe des cas où la dette devrait être annulée pour les Etats. Par exemple, la dette accumulée en réalité par des dirigeants véreux, tels que le Président de l’ancien Zaïre, Joseph Mobutu, ne devrait pas être un fardeau pour la population actuelle de la République Démocratique du Congo.

Une bonne partie de la dette accumulée sous la mauvaise administration du président Zambien Kenneth Kaunda a été annulée, et sous l’égide de l’initiative du FMI et de la banque Mondiale pour les Pays Pauvres Très Endettés, les fonds dégagés grâce à l’annulation de la dette sont utilisés pour les programmes sanitaires entre autres. Pour autant, une grande prudence doit entourer l’effacement de la dette, de telle sorte que cela ne conforte pas des dirigeants corrompus et ne perpétue pas ainsi des politiques économiques catastrophiques.

Le G8 va au-delà de l’effacement de la dette en cherchant à mettre fin au « contentieux agressif » à l’encontre des pays pauvres très endettés. Le contentieux émerge souvent lorsque les créanciers, qui ont abandonné tout espoir de récupérer la dette qu'on leur doit, la vendent sur des marchés secondaires. Les investisseurs achetant sur ce marché secondaire font alors appel au système judiciaire pour récupérer ce qui leur est dû par des Etats souverains. Appelés parfois les « fonds vautours », ces investisseurs jouent en réalité un rôle important dans la finance internationale.

Prenons le cas de la République du Congo, un pays avec de vastes ressources qui est dirigé par le très corrompu Denis Sassou-Nguesso. Chaque année le Congo gagne près de 6 milliards de dollars en pétrole. Très peu de cette somme est allouée à l’amélioration de la vie des congolais ordinaires. Selon le Programme de Développement des Nations Unies, l’Indice de Développement Humain du Congo place le pays à la 139ème place sur 177. Alors que sur les vingt dernières années la qualité de vie de la plupart des gens autour de la planète s’est améliorée, en particulier en Asie, elle a graduellement reculé au Congo. La corruption dépensière de l’élite au pouvoir en est en partie responsable. Des reçus de carte bancaire ont prouvé que Denis Christel Sassou-Nguesso, fils du président, a fait des folies dans les magasins de luxe de Paris et d’ailleurs pour la coquette somme de 200.000 dollars. Lorsque l’entourage de son père s’est rendu à New York pour un sommet des Nations Unies, ils ont réglé une note d’hôtel de 300.000 dollars, et quasiment tout en cash. Et pourtant M. Sassou-Nguesso a invoqué sa pauvreté et refusé de payer les dettes du pays lorsqu’elles ont été rachetées par les dirigeants du hedge fund Elliot & Associates. Après des années d’enquête sur les actions du Congo, Elliot Associates a mis en exergue la corruption généralisée et la mauvaise gestion du Congo et est finalement arrivé à récupérer en partie ses fonds.

Le G8 et certains membres du Congrès américain souhaitent interdire de telles pratiques de rachat de dettes par des investisseurs. Mais cette interdiction reviendrait à faire le jeu de dirigeants corrompus qui ont enchaîné l’Afrique depuis trop longtemps. Si le G8 veut réellement aider l’Afrique, il devrait travailler à bâtir des systèmes financiers sains, et assurer que les élites aux pouvoirs soient tenues responsables des dettes qu’elles contractent. Les dirigeants du G8 ne rendraient pas service à l’Afrique en ne demandant pas aux dirigeants de celle-ci de rendre de comptes. Cette attitude trahirait en réalité tous les Africains qui tentent de construire des sociétés et des économies fondées sur l’état de droit, la responsabilité et les droits individuels, le libre commerce et l’entreprise privée. Tant que le G8 ne tiendra pas les Etats et les élites au pouvoir pour responsables de leurs mauvaises décisions, il n’y aura pas d’incitation à améliorer les politiques publiques. Sans ces réformes et une responsabilisation accrue de la part des vrais vautours – les élites corrompues – les africains ordinaires resteront miséreux, coupés de l’économie mondiale et privés d’un futur meilleur.

Franklin Cudjoe, est directeur d’Imani, le think tank pour les idées de la liberté au Ghana, et est responsable du site AfricanLiberty.org. 

www.unmondelibre.org

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Commentaires
M
Mon expérience personnelle me fait dire que plus on exige des gens de prendre en compte la complicité ou tous les données d´un problème afin de mieux le résoudre, et plus la plupart des gens s´en désintéressent ; c´est simple : la plupart de ceux qui souffrent d´une situation quelconque, et même si ils crient de bonne foi au changement, ne sont pas ceux qui ont les moyens ni d´appréhender cette déplorable situation dans toute son objectivité, ni ceux qui, par leur intelligence et leur capacité rationnelle, se donnent réellement le devoir de remédier aux choses. En Afrique, comme partout ailleurs, le nombre des uns et des autres est plus ou moins constant. Le drame pour l´Afrique est que les maux de l´endettement infructueux – plus dévorateur que promotionnel – dans lequel se débattent plusieurs pays africains actuellement est qu´il est utilisé systématiquement, ou son but n´a pas pour objet de financer le meilleur développement des africains, mais bien de les employer, d´user de leurs faiblesses financières afin de faire profit. Et ceux qui se sont, par incompétence ou par ignorance, adonnés à ce faux jeu truqué, ce ne sont autres que les élites africaines corrompues et traîtres aux intérêts des leurs. Maintenant clamer ou réclamer l´effacement pure et simple de ces dettes ne change en rien la mauvaise foi de ces messieurs qui profiteront de nouveau de leurs nouvelles possibilités pour s´endetter de nouveau. Parce que, ni les apparences démocratiques ostentatoirement affichées des africains actuellement, ni le manque de véritables structures de production, de formation universitaire et professionnelle, et encore moins l´emploi intensif de ces derniers ne permettent de garantir le changement vers de meilleures utilités de moyens et instruments de relève économique, technique et financier. Alors, demander l´effacement comptable du poids des dettes pour rien ? L´Afrique doit, comme le dit si bien cet article, se débarrasser de ses sangsues, de ses fausses illusions et de sa mentalité passive ou ses complexes de retenue si elle voulait garder ou éveiller l´estime admirateur des investisseurs étrangers ; après tout, il s´agit de son avenir et de celui de ses enfants.<br /> <br /> J´ai eu à répondre à cette question dans un article publié dans le « Diplomatie Afrique Magazine » ; et j´ai peur qu´on attendait de moi que j´appuie l´argument de biens d´africains selon lequel cette dette extérieure devait être effacée afin que les économies africaines repartent d´un nouveau pied. Seulement, qui me dit que les manquements et les abus que ces endettements ont mis à jour, seraient désormais vaincus et empêchés à commettre leurs méfaits sur le développement des africains ?<br /> Parce que, soyons sincères : ce n´étaient pas seulement les crocodiles étrangers qui étaient à l´œuvre, mais les africains aussi !<br /> Aussi me suis-je contenté de conseiller aux africains à faire tabula rasa de tout ce qui nuisait logiquement et structurellement au bon usage et à la rentabilisation de leurs maigres efforts…avant de parler de délaissement de dette. <br /> Actuellement, et c´est dû sûrement au désordre autant qu´au désarroi économique qui sévit en Afrique, les intellectuels n´arrivent pas à s´imposer en structurant la marche culturelle logique et rationnelle à suivre pour sortir du marasme. Quoi d´étonnant ; beaucoup trop parmi eux ont, par opportunisme ou par simple cupidité, accompagné et secondé l´élite crapule et incapable dans leurs abus et leurs turpitudes. Se démarquer aujourd´hui de ces geôliers et dictateurs corrompus est devenu difficile, parce que le peuple, malgré tout, se demande s´ils méritent sa confiance. Or le chemin des réformes, celui de n´importe quelle ambition sociale de développement est long, ardu et patient ; il nécessite une assiduité et créativité attentive, suivie et conséquente qu´une critique sévère autant qu´une grande confiance en soi doit accompagner. Les élites africaines en étaient-ils capables ? Ou feraient-elles comme par le passé en allant s´approvisionner, se cacher dans la culture occidentale pour ne pas avoir à subir ou supporter les efforts et les inconvénients momentanés que leur impose la leur propre ?<br /> <br /> Bien de questions. Et les plus doués d´entre nous devraient avoir la sincérité d´y répondre, plutôt que de croire que ces questions seraient, demain ou plus tard, résolus pour eux par des étrangers. Je sais que lorsque les choses deviennent difficiles, généralement on sait facilement séparer la graine de l´ivraie : ceux qui restent et se cassent la tête à résoudre de genre de question, ce sont les vrais africains conscients et responsables ; les autres, ce sont plutôt ce que j´appelle des passagers clandestins du Navire Africain. Quand il fait beau, ils dansent ; quand il pleut et que l´effort est à l´ordre du jour, ils se défilent et attendent de venir profiter du changement. Et certes ces derniers sont aussi africains, mais croire qu´ils sont ceux qui représentent au mieux l´amour africain envers sa culture, son avenir, ou le souhait partagé du bien-être de ses enfants…cela est de la pure inconscience grossière. L´Afrique a bien meilleurs enfants doués et dignes de sa confiance et de son amour. Et ce sont de ceux-là dont nous avons besoin aujourd´hui, pas de parasites et d´hypocrites malsains et opportunistes. <br /> <br /> Musengeshi Katata<br /> Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu<br /> Forum Réalisance
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